Connaissez-vous P-A Méthot? Pour ceux qui ne le connaissent pas, laissez-moi vous décrire la bête : il a 40 ans, il mesure 6 pi, il pèse 275 lb, il a une bedaine et les bras plein de tatouages. Il fume, il tousse et s’essouffle au moindre effort. Sa voix forte et haut perchée est aussi rocailleuse que les berges de sa Gaspésie natale. Pendant 18 ans, c’est au pic et à la pelle qu’il a fait son chemin dans les bars de Québec et dans des spectacles corporatifs partout en province. Il s’était résigné à ne jamais connaître les grands honneurs, puis un jour, Peter MacLeod lui a donné son break. « Lui et moi, on s’était croisés dans plusieurs festivals, dont Le Grand Rire à Québec et au Festival Juste pour rire à Montréal. On se connaissait mais sans plus. Un jour, nous faisions un spectacle ensemble dans un bar et c’est lui qui a fait les premiers pas. (Rires) Il m’a dit : « C’t’assez, faut qu’on te sorte des bars ». Tu as assez de talent et de matériel. Je vais en parler à mon producteur et si ça ne marche pas, je vais moi-même te produire en spectacle. Peter allait avoir besoin d’une première partie à son nouveau spectacle. Au début, je me disais que c’étaient peut-être des paroles en l’air, mais le lundi suivant, le téléphone a sonné et presque tout était déjà réglé. » Après avoir fait les premières parties de Peter MacLeod et aussi celles de Jean-Michel Anctil, donc s’être fait connaître d’au moins 100 000 de leurs spectateurs, voilà qu’il rode en ce moment son premier one-man show, ayant pour nom Plus gros que nature et dont le mise en scène est assurée par nuls autres que ces deux célèbres mentors.
Quand on demande à P-A. lequel des trois mots, entre PLUS, GROS et NATURE, le décrit le mieux, il répond en éclatant de rire… « QUE! En fait, si mon show s’appelle ainsi, c’est surtout parce que je parle de moi. Je parle que je suis bipolaire, que je suis un nouveau papa, que je me suis acheté une maison, etc. Ce n’est pas que ça me fatigue, mais les Noirs font des jokes de Noirs, les Arabes des jokes d’Arabes, les gais des jokes de gais et les gros des jokes de gros. Moi, la première affaire que tu vois quand j’entre sur le stage, c’est que je suis gros. Est-ce que j’ai vraiment besoin de le souligner? Vous l’avez vu que je suis gros, maintenant, on passe à autre chose. » Outre sa corpulence lorsqu’il entre en scène, et c’est là que ses années de spectacles dans les bars lui servent, il capte l’attention de son auditoire en un instant, même de ceux qui n’étaient pas venus pour le voir.
Une fois c’t’un gars en show
Quelle est la chose la plus étonnante qui lui soit arrivée en spectacle? « Une fille a crevé ses eaux. Même que ça m’est arrivé deux fois. Je n’étais même pas dans le punch, j’amorçais à peine une de mes blagues et tout à coup j’ai entendu Ahhhhhhhhh! Un cri de mort dans la salle. J’ai vu un gars tenir la main de sa blonde, ils se sont levés de leurs sièges et sont partis. Le lendemain, elle m’a écrit un courriel de l’hôpital me disant qu’elle avait accouché d’un garçon.
L’humour ou le sexe?
Puisque nous sommes entre gars, et j’ajouterais même entre gras, j’ose lui demander si les femmes sont plus impressionnées par son aisance sur scène ou au lit? « Par mon aisance sur scène. Au lit, et j’en parle dans mon spectacle, je ne suis pas un super amant. Je dirais que je suis average. J’ai beaucoup d’imagination et je m’en sers avec ma blonde. Écoute, je pèse 275 lb et à un moment donné, les bras me chauffent; après un certain effort, je sens mon pouls dans la gorge. Mon corps voudrait aller plus loin mais mon cÅ“ur me dit… Ça serait l’fun que tu ne meures pas avant à la fin. » (Rires)
On peut sortir le gars du bar, mais…
Avec ses airs de gars de party, on serait porté à croire qu’après ses shows, il se met « chaud ». Détrompez-vous! « Avant d’avoir mon diagnostic de bipolarité, j’étais comme tout l’monde. En plus, comme je viens de la Gaspésie, j’avais le coude facile. Mais l’alcool me rendait angoissé et parfois même agressif. En plus, quand j’étais « chaud », comme je suis un gars doux de nature, je n’arrivais pas à me battre. Ma blonde de l’époque m’a dit : « Tu as un méchant problème avec ça et si tu ne le règles pas, je m’en vais. » Ça fait maintenant 16 ans que je suis sobre et même si nous ne sommes plus un couple, elle est restée ma meilleure amie. »
S’il y a une évidence qui saute aux yeux, c’est que la majorité des humoristes, parce qu’ils s’en confessent publiquement, souffrent d’anxiété, de troubles ou carrément de maladies mentales. Faut-il être fou pour être un bon humoriste? « J’ne l’sais pas. C’est vrai que nous sommes une gang à être déphasés! (Rires) Moi, j’ai appris que j’étais bipolaire il y a 12 ans et ç’a été une libération. Je ne voudrais jamais revenir en arrière. Avant, je me questionnais et je me dénigrais. C’est en spectacle que j’allais chercher l’amour dont j’étais incapable pour moi. Cette souffrance et cette détresse-là m’ont fait perdre bien des années de ma vie, mais m’ont aussi permis d’écrire des textes qui aujourd’hui touchent les gens. Je crois que tous les humoristes ont des carences affectives, mais sinon, ce n’est pas un préalable. »