Critique de « Splinter Cell: Blacklist » : un bon petit entre-deux d’infiltration
Pierre-Olivier LavoieUne histoire correcte, je suppose
Fidèle à ses sources, Splinter Cell: Blacklist nous place dans les souliers de Sam Fisher, l’homme en fin de quarantaine qui semble rajeunir d’opus en opus depuis le début des années 2000. Ce dernier est maintenant promu comme commandant du Fourth Echelon, une unité super-méga-trop-secrète-de-la-mort qui protège la planète (les États-Unis) contre les méchants terroristes, souvent arabes, russes, chinois ou encore coréens.
Faisant cette fois face à un groupe de méchants assez diversifiés culturellement parlant, dénommés The Engineers, Sam doit tenter le tout pour le tout afin de sauver son pays. Maintenant équipé d’un avion, qui fait office de « Bat-cave mobile », notre super-espion peut se promener autour du monde, tout en ajustant ses gadgets sur le vif et en discutant avec son équipe en temps réel.
Sans dire que l’histoire est mauvaise, puisqu’elle cache sans doute un bon fond, on tombe ici dans le cliché des histoires militaires et terroristes. On a un protagoniste, cette fois très sérieux et dénué du petit humour noir qu’il possédait en début de série, qui échange une panoplie de dialogues super-sérieux avec des coéquipiers qui n’ont jamais le temps de s’expliquer. On a donc droit à des dialogues rapides, essoufflés, bourrés d’abréviations militaires et incompréhensibles. N’ayez crainte cependant, car même si vous ne comprenez rien du jargon de Sam et de son équipe, au final, on nous sert un scénario assez by the book.
Un jeu maîtrisé
Ubisoft voulant revenir sur sa petite crise existentielle et son amour inconditionnel pour la série télé 24 que l’on avait pu voir avec son précédent opus, Splinter Cell: Conviction, on nous sert ici un jeu ressemblant davantage aux premiers qu’aux derniers. Et c’est une bonne chose!
On nous propose donc de jouer selon la méthode qui nous convient. Vous voulez tuer tout le monde, tout en restant parfaitement discret? C’est totalement possible. Vous préférez être un fantôme et neutraliser de manière non létale vos ennemis, voire passer auprès d’eux sans la moindre alerte? Allez-y, vous serez même récompensé! Et si vous êtes l’un de ces joueurs avec aussi peu de patience que de tempérament, alors sortez vos fusils à pompe et votre armure pare-balles, parce qu’on vous récompensera aussi pour cette méthode.
Avec autant de liberté, on peut donc équiper notre agent à notre goût, lui faisant vêtir des pièces d’équipement qui octroieront divers bonis en fonction de vos besoins. J’ai donc grandement aimé pouvoir refaire les niveaux en adoptant des styles différents, obtenant de ce fait diverses médailles disponibles dans les niveaux. On mise très clairement, donc, sur la possibilité de rejouer de différentes manières plutôt que de se faire lier les poignets par la scénarisation théâtrale de l’opus précédent.
Un contrôle particulier
Si j’avais une dent contre Blacklist, c’était initialement en raison de son contrôle. Bien que je me sois finalement habitué (au bout de quelques heures…), je ne peux pas dire que la prise en main est facile. Afin de complémenter notre style de jeu à la troisième personne, on nous offre ici des manœuvres assignées à des boutons que l’on utilise rarement à ces fins dans d’autres jeux. Après une génération passée à recharger avec le même bouton, il est étrange de devoir presser sur le joystick droit pour alimenter nos armes.
J’aurais bien fini par passer par-dessus ce petit exemple si le jeu se limitait à la vue et au contrôle à la troisième personne. Mais puisque le jeu nous met, à une occasion et surtout en multijoueur, à la première personne comme dans un jeu de tir traditionnel, je dois avouer avoir souvent été berné par le contrôle. Comme il est impossible de changer soi-même ses boutons, il faudra donc vous armer de patience, surtout si vous êtes habitué de jouer à des jeux de tir sur console.
D’ailleurs, à défaut des contrôles étranges et des systèmes de jeu moyennement expliqués, la mission de tutoriel de Blacklist est probablement l’une de celles que j’ai recommencées le plus souvent dans ma vie. Non pas par choix, mais bien parce que je mourais constamment, repéré alors que je ne croyais pas l’intelligence artificielle capable de me voir, comme je l'ai appris dans les opus précédents.
Évidemment, au bout d’une demi-douzaine d’heures de jeu, j’ai pu refaire, avec beaucoup plus d’efficacité, ces séquences que j’avais maladroitement accomplies.
Un jeu d’infiltration convaincant
Si Splinter Cell: Blacklist m’a étonné sur un plan, c’est sur le comportement des gardes ennemis que vous aurez à déjouer. Ceux-ci, généralement placés de façon stratégique, verront leurs rondes et patrouilles modifiées lorsque vous recommencerez les niveaux, ajoutant une touche d’imprévu grandement appréciée.
Vous venez de zigouiller un garde et de cacher sa dépouille? Faites attention que son pote ne vienne pas trop près de sa zone de patrouille, parce qu’il réalisera bien vite que son ami manque à l’appel. Fini les gardes qui ont une mémoire de poisson rouge et qui n’ont aucune réaction devant la disparition subite de leurs congénères.
Camouflé par le couvert de l’obscurité? Faites gaffe de ne pas faire trop de bruit ou de vous croire entièrement invisible, parce le moindre mouvement dans la pénombre risque d’attirer l’attention d’un garde qui croira avoir discerné quelque chose. Si votre tenue de combat est trop alourdie par des couches de protection, vous bougerez moins vite, au risque de vous faire entendre, et ce, même accroupi!
En progressant dans le jeu, un système de pointage viendra féliciter vos prouesses, qu’elles soient bruyantes, sauvages ou discrètes. Par le biais de ces points, vous pourrez augmenter et modifier vos armes, équipements, gadgets et même votre avion de super-espion-de-la-mort. Augmentez l'habitacle et vous pourrez avoir un radar en jeu, démontrant la position des ennemis. Augmentez votre cargo et vous pourrez stocker davantage d’armes.
Un multijoueur correct
S’ajoutent au jeu un mode coopératif ainsi que quelques modes multijoueurs qui risquent d’exciter les amateurs de jeu en ligne. Les missions coopératives, dont la plupart peuvent être jouées seules, vous permettront de revenir dans la majorité des niveaux et d’accomplir des objectifs différents, avec des restrictions différentes. N’étant pas particulièrement excité par le fait de traverser les niveaux à deux, j’ai préféré m’en tenir à parcourir ces missions en solo.
On nous offre aussi le fameux mode « Spy vs Merc », faisant son retour dramatique depuis trop longtemps déjà. Initialement vraiment innovateur lorsqu’il avait été présenté avec l’épisode Pandora Tomorrow, ce mode nous permet de jouer en tant que mercenaire ou espion, alors que l’équipe de ces derniers devra tenter de pirater des ordinateurs prédéfinis, tout en se cachant des méchants soldats.
Jouer en tant que mercenaire me ramène à ma bête noire : le contrôle bizarre imposé par le jeu. Étant forcé dans une vue à la première personne comme dans n’importe quel jeu de tir, j’ai eu bien du mal à m’amuser avec les boutons mélangés imposés par le jeu. Ceux qui auront plus de patience et d’adresse y verront certainement plus d’intérêt.
Il est aussi possible de jouer dans une sorte de deathmatch, dans lequel les joueurs sont aléatoirement des espions ou des mercenaires, créant des joutes assez amusantes. Bien que je ne voie pas vraiment les modes en ligne survivre plus de six mois, ceux qui raffolent des additions multijoueurs devraient s’y plaire pendant le temps que le jeu reste actif.
Verdict
Splinter Cell: Blacklist demeure pour moi une réussite, un bon jeu d’infiltration dans la veine de Hitman: Absolution, de Mark of the Ninja et de Dishonored. Bien qu’il ne parvienne pas à les surpasser, il reste confortablement leur égal. Vous aimez les jeux d’infiltration qui possèdent une durée de vie très honnête et un bon multijoueur? Gâtez-vous.
Ce que vous aimerez :
– La variété des niveaux
– L’excellent design
– Les possibilités diverses
Ce que vous n’aimerez pas :
– Le jargon militaire incompréhensible
– La nouvelle voix de Sam Fisher qui manque d’humour
– Le contrôle exigeant
Note : 8 sur 10