2e partie (série de quatre chroniques)
Les géants de mon enfance, des hommes aux muscles puissants mais avec un regard plein de tendresse et de respect. À mes yeux de petit garçon de huit ans, ces hommes étaient à la fois indestructibles et invulnérables, mais également sensibles à la beauté du monde.
Par exemple, ils étaient des mordus de musique. Ils aimaient chanter… sauf mon père qui disait toujours qu'il n'avait pas ce talent. De belles voix d'hommes graves et profondes. Surtout Pierre, « le grand Pierre » comme ils l'appelaient, avec sa voix de basse qui résonnait partout dans la maison. Quand il acceptait de nous interpréter une pièce, c'était un privilège... Il était le plus secret d’entre eux et l'on sentait que c'était sa façon à lui de nous ouvrir son cœur.
C'était ma mère qui les accompagnait au piano. Elle avait un talent naturel. Chacun interprétait ses pièces préférées. Des chansons du répertoire de la Bonne Chanson ou des airs d'opéras ou d'opérettes. Quand ils chantaient, il y avait de l'émotion dans l'air. À l'occasion, je surprenais des larmes au coin de leurs yeux. Les plus beaux et les plus grands moments étaient quand ils chantaient tous en chœur. C'était merveilleux, bouleversant et magique. La musique était pour eux le langage du cœur et de l'âme. Ils avaient une immense admiration pour les grands musiciens et les célèbres chanteurs. La musique les inspirait, les transportait dans un monde meilleur.
Aujourd'hui, cinquante ans plus tard, je réalise que j'ai été un petit garçon choyé par la vie de croiser ces hommes. Ils m'ont appris à m'émerveiller, à être curieux et à vouloir connaître et respecter le monde qui m'entoure. Ils m'ont aussi communiqué l'amour de la musique. Je m'ennuie encore d'eux.
C'étaient les hommes de mon enfance : des géants au cœur sensible.
Mabodu le psy