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« La Mondaine » : Entrez dans le Paris sale et méconnu des années 1930

« Bienvenue à la Mondaine! »

Le récit débute en pleine occupation allemande. Nous sommes en avril 1944. La Ville Lumière est bombardée par l’aviation britannique. Les Parisiens n’ont d’autre choix que de se réfugier sous terre et espérer ne pas être frappés par l’une de ces bombes.

Aimé Louzeau fait partie de l’un de ces habitants, mais il n’est pas un citoyen ordinaire. Il est membre de la brigade des moeurs, mieux connue sous le nom de la Mondaine. À la demande d’un sympathique officier allemand, il va raconter son histoire.

L’album fait alors un bond de près de 10 ans dans le passé. Nous sommes en novembre 1937. La Deuxième Guerre mondiale n’a pas encore éclatée, mais Paris demeure sinistre. L’hiver n’est pas loin, après tout. 

C’est la première journée de travail de Louzeau à la Mondaine, et disons qu’il va s’en rappeler longtemps! Ses collègues inspecteurs ne font pas dans la dentelle. Et que dire des suspects qu’ils appréhendent et de l’inspecteur en chef, qui est un roi de la bicyclette encore à son âge!

Au fil des jours, il va apprivoiser ce monde méconnu. Peu à peu, il va réaliser que ses collègues ont tous leurs petits secrets et qu’ils sont loin de prêcher par l’exemple. Véritables cordonniers mal chaussés, ils n’hésitent pas à fréquenter des femmes de petite vertu, et ce, même s’ils sont mariés! D’ailleurs, Louzeau va se laisser bien malgré lui prendre au jeu et adopter rapidement les mauvaises habitudes de ses collègues (il va quand même lutter, un certain temps). 

Un salaud attachant

Et c’est ça qui plaît autant dans La Mondaine. L’album emprunte  évidemment quelques références au film noir, mais sait aussi se démarquer. Le héros est, par exemple, loin d'être valeureux et incorruptible. Louzeau ne souhaite pas faire le ménage dans le département des moeurs. Il souhaite seulement entrer dans le moule et si cela veut dire sombrer dans la corruption et la déchéance, pourquoi pas?

De l’autre côté, le protagoniste n’est pas un être ignoble, si bien que l’on finit par s’y attacher. Après tout, il ne s'agit que d'un homme ordinaire qui va être transformé progressivement par son milieu. On pourrait presque dire la même chose de ses collègues policiers que l’on pourrait qualifier de « bons » salauds. 

Au crayon, Jordi Lafebre a fait un vrai miracle. Les environnements extérieurs lugubres détonnent avec la chaleur des décors intérieurs qui sont plus qu’invitants. Les personnages sont, pour leur part, souvent dodus (le dessinateur semble d’ailleurs faire une fixation sur les popotins de gros messieurs) et ont un visage qui reflète le genre de vie qu’ils ont. 

Le seul reproche que j’aurais à faire concernerait les quelques planches consacrées à la période de la Deuxième Guerre mondiale. Il est vrai que l’on est seulement dans le premier tome (la série doit compter deux tomes), mais je ne comprends pas encore leur importance dans le récit. Peut-être que la suite va nous éclairer là-dessus.

Verdict 

Le tandem Zidrou-Lafebre récidive en nous offrant un nouvel album d’une grande qualité. Nous prenons un grand plaisir à découvrir le Paris sale et glauque des années 30, ainsi que ses différents acteurs, certes à la moralité douteuse, mais terriblement humains.

Cote : 4,5 étoiles sur 5

La Mondaine

Zidrou et Jordi Lafebre 

64 pages

Dargaud

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