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Critique cinéma : « Cyanure »

Le retour du héros
 
Achille (Alex Etzlinger) est un jeune adolescent qui s’apprête à fêter ses 14 ans. Il vit seul avec sa mère Pénélope (Sabine Timoteo). Il n’a jamais connu son père Joe (Roy Dupuis), qui a passé les quatorze dernières années derrière les barreaux. Comme beaucoup de jeunes de son âge, il a l’imagination fertile et n’a cessé d’idéaliser son père, croyant qu’il était un bon et courageux truand.
 
Contre toute attente, le garçon apprend que son paternel sera enfin libéré pour bonne conduite. Malheureusement, Joe n’est pas tout à fait le type d’homme qu’Achille imaginait. Les deux vont devoir s’apprivoiser.
 
Recoller les morceaux brisés
 
Peut-on arriver à réparer les vieilles erreurs du passé? Peut-on changer après autant d’années en prison? Est-ce qu’un père peut éprouver de l’affection pour un fils qu’il n’a jamais connu? Devient-on du jour au lendemain un père exemplaire? C’est un peu à ces questions difficiles que tente de répondre le nouveau film de Séverine Cornamusaz.
 
Ce film est axé principalement sur la relation tripartite qui lie cette famille « reconstituée Â». Au début, Joe est vu surtout comme un intrus par sa femme et semble ne pas éprouver grand-chose pour son enfant, ce qui cause beaucoup de peine à ce dernier. Mais à mesure que l’on avance dans l’intrigue, les liens entre les trois membres de la famille semblent se raffermir, si bien qu’ils commencent même à ressembler à une vraie famille. Joe va jusqu’à promettre à Achille de ne plus jamais être séparé de lui. Arrivera-t-il à tenir cette difficile promesse?
 
Ainsi, ce long métrage de 109 minutes se focalise surtout sur les membres de cette famille et l’évolution de leurs relations. La quasi-totalité des scènes nous présente au moins un des membres. Il y a d’ailleurs très peu de personnages secondaires. Les deux seuls qui présentent un intérêt sont, en premier, Alexis (Christophe Sermet), le patron et amant de Pénélope. Celui-ci est au courant de la situation particulière de Pénélope et va tout faire pour qu’elle ne retombe pas dans les griffes de Joe. L’autre personnage important est Mathilde (Ludivine Geschworner), la meilleure amie d’Achille. Moins présente à l’écran, elle va quand même jouer un rôle très important dans la vie de son ami en l’aidant à passer à l’âge adulte.
 
Des décors sobres, mais qui collent bien à l’histoire
 
Ceux qui s’attendent à voir de belles montagnes d’Europe en allant voir ce film vont être déçus. C’est vrai qu’il y a quelques jolis plans, mais le plus clair de l’action se déroule dans la maison en mauvais état de Pénélope et Achille, et dans la roulotte de Joe qui, à l’instar de son propriétaire, a mal vieillie.
 
Les décors ont été très bien choisis et collent parfaitement aux personnages. Même s’ils ne roulent pas sur l’or, ils peuvent mettre les problèmes d’argent de côté et se concentrer sur l’essentiel, c’est-à-dire à reconstruire les liens ténus qui les unissent.
 
Des sujets difficiles, mais bien présentés à l’écran
 
Ce long métrage traite donc de sujets plutôt délicats. Cependant, la réalisatrice ne fait pas l’erreur de tomber dans le sensationnalisme ou dans l’excès. Les personnages sont, du moins en apparence, calmes. Il n’y a, par exemple, pas d’engueulade à n’en plus finir entre Pénélope et Joe ni de scènes de violence gratuite. Si ce n’était pas des scènes d’érotisme, Cyanure s’adresserait à un large public.  
 
Même si ce n’est pas l’objectif premier de cette production, Cyanure arrive à dénoncer, du moins subjectivement, le système judiciaire. Comment se fait-il que Joe semble si déstabilisé à sa sortie de prison? Pourquoi a-t-il autant de difficulté à se trouver un emploi?
 
Le jeu des acteurs est très convaincant. L’accent français de Roy Dupuis pourrait en faire sourire quelques-uns qui sont habitués de le voir dans des productions québécoises, mais personnellement, cela ne m’a vraiment pas dérangé. Il offre une prestation solide. Alex Etzlinger est très attachant dans le rôle de cet adolescent qui veut tellement plaire à son père et recevoir son amour. C’est une belle découverte.

Le seul problème de Cyanure, c’est que le cinéphile a souvent de la difficulté à s’identifier pleinement aux personnages. Même s’ils sont attachants, il y a un petit quelque chose qui nous empêche d’être complètement transporté dans leur peau. C’est comme si on avait de la difficulté à ressentir de la compassion pour ce qui leur arrive. 
 
Verdict
 
La plus grande force de Cyanure est qu’il est capable d’aborder avec délicatesse et parfois avec de l’humour et de la légèreté des sujets difficiles comme la réREPLACEion sociale et l’amour inconditionnel d’un enfant envers son père. On ne sort pas du cinéma bouleversé, mais un peu plus soucieux du sort des familles qui ont été divisées par l’emprisonnement de l’un de leurs membres.
 
Cote : 3,5 étoiles sur 5
 

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