Nightly News​
En peu de temps, Jonathan Hickman est devenu un incontournable de la bande dessinée américaine. Il est connu aujourd’hui pour les séries Pax Romana et East of West. Toutefois, c’est avec un autre album, Nightly News, qu’il s’est fait connaitre. Urban Comics nous a offert récemment la version française de cette oeuvre singulière.
Attention. Si vous avec lu East of West et pensez retrouver le même esprit, vous êtes dans l’erreur. Nightly News en est complètement à l’opposé. Nous suivons les membres de l’organisation terroriste La Première Église de la Fraternité de la Voix qui s’est donné comme mission de détruire complètement la caste des journalistes. Les membres de cette secte n’hésitent pas à assassiner au sniper des journalistes en pleine rue et à faire exploser leurs « repaires », c’est-à-dire tous les lieux qu'ils fréquentent, comme les bars.
Les membres de cette organisation sont convaincues que les journalistes essaient d’endoctriner la population en leur lançant toutes sortes de mensonges que les gens finissent par croire.
Un style graphique distinct
Si vous avez déjà mis la main sur un exemplaire de Pax Romana, vous serez sans aucun doute en terrain connu. Sinon, attendez-vous à être passablement dépaysé. Hickman adopte un style vraiment libre. Par exemple, il n’y a aucune case. Mais ce n’est pas ça qui « dérange » le plus. Ici et là, on retrouve des graphiques et tableaux essayant de nous expliqués le merveilleux monde des médias, comme s'il s'agissait d'une étude sérieuse. On trouve aussi, sur plusieurs planches, des notes tentant d’expliquer tel ou tel propos. Elles sont tellement petites qu’il faut être bien attentif pour les trouver, sinon on peut les manquer. Je dois d'ailleurs vous avouer que j’ai eu un mal fou à les lire. Elles étaient écrire en caractère 6 ou moins!
Le graphisme particulier n’est pas le seul élément qui classe Nightly News dans une catégorie à part. L’histoire est l’une des plus violentes et troublantes que j’ai lues dans ma vie. Ce ne sont pas les actes de violence en soi qui dérangent, mais plutôt comment ils sont perpétrés.
Dans les pays occidentaux, les journalistes sont rarement assassinés. Voir des dizaines de journalistes se faire abattre dans cet ouvrage comme de vulgaires oiseaux dérange particulièrement. Si vous êtes dans le domaine des médias, vous risquez d'être choqué par votre lecture ; autant vous le dire.
Avant de conclure, spécifions que l’on retrouve une espèce de making of à la fin de la BD. L’auteur nous parle de sa démarche. Il nous parle, entre autres de ses sources d’inspiration et comment il en est arrivé à un dessin aussi particulier. C’est rare que l’on puisse avoir autant d’information sur le processus de création. C'est toujours très plaisant à lire!
Verdict
À tous les niveaux, Nightly News nous sort de notre zone de confort. Mais je pense que c’était nécessaire parce que l’oeuvre arrive à transmettre aux lecteurs un message solide : peut-on toujours se fier aux médias pour nous communiquer la vérité? Après avoir lu cette BD de Jonathan Hickman, j'en doute fort…
Urban Comics
Cote : 4 étoiles sur 5.
Cicatrices
Je ne suis pas un spécialiste des conflits qui ont opposé la Chine et le Japon. Nous, les Occidentaux, nous en avons que très peu entendu parler, à moins d’avoir suivi des cours spécifiques en histoire. Il reste que cette période dans l’histoire de l’humanité est à la fois fascinante et dramatique. N'oublions pas, quand même, que le conflit a fait des millions de morts chez les deux camps. L’auteur chinois de bandes dessinées Li Kunwu nous propose, avec son oeuvre Cicatrices, de découvrir un moment troublant de l’histoire de la Chine.
Cicatrices est un peu comme un voyage dans le temps. En sortant pour visiter un marché d’antiquités, Monsieur Li va faire la connaissance d’un drôle d’antiquaire qui le mettra en contact avec des archives de la Seconde Guerre sino-japonaise, qui a commencé en 1937 et avant de se terminer en 1945, avec la reddition du Japon dans le cadre de la Deuxième Guerre mondiale.
Monsieur Li va notamment avoir la chance de consulter des milliers de photos prises par des journalistes japonais sur le sol chinois pendant le conflit. Il va tout faire pour essayer d’obtenir ce trésor inestimable, mais le maitre de l’antiquaire, à qui appartiennent ces photos, ne voudra rien savoir. Il ne lui restera qu’une seule option : photographier le plus de photos possible avec son appareil photo.
Un scénario?
Autant le dire tout de suite, le scénario de Cicatrices occupe une place très modeste dans l’album. Il n’est qu’un simple prétexte pour nous montrer les documents d’archives récupérés par l'auteur. Ainsi, plus de la moitié de l’ouvrage est composé de vraies photographies datant des années 1940. On peut tourner des dizaines de pages sans voir aucune bulle ou presque.
À certains égards, Cicatrices se classe même plus comme un livre d’histoire qu’une bande dessinée. Si vous êtes à la recherche d’une BD qui veut « romancer » le conflit sino-japonais, vous serez déçu. Bien qu'étant un grand amateur de phylactères et de cases, j’ai eu un grand plaisir à plonger dans cette période méconnue de l’histoire de l’Asie.
Les nombreuses photos montrées dans l’album sont fascinantes sans pour autant chercher le « spectacle » à tout prix. Il n’y a pas de membres arrachés ou d’exécutions, par exemple. On s’éloigne ainsi un peu de ce qu’on a pu voir dans la très bonne série Apocalypse sur TV5. Malgré cela, que vous soyez ou non un amateur d’histoire, ces photos ne vous laisseront pas indifférent.
Verdict
Bandes dessinées ou livre d’histoire? Peu importe comment on l’appelle, Cicatrices est un livre qui vaut le détour si vous avez envie de voir la Chine et le Japon sous un autre jour!
Cicatrices
Li Kunwu
Urban China
Cote : 4 étoiles sur 5